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L'Inadmissible
1 juillet 2009

UNDER THE BRIDGE ET LES MOTS PASSANT

C’est l’histoire d’un clodo qui trouve un bébé sous un pont.

Non, ce n’est pas la nouvelle blague à la mode, c’est le texte de Le Clézio qui est tombé ce matin.

Quand je dis " c’est le texte de Le Clézio qui est tombé ce matin, " je pense par réflexe à un thème d’Agreg, tant il est vrai que le Prix Nobel de l’an dernier obtient souvent les faveurs des jurys de concours.

En réalité, quand je dis " c’est le texte de Le Clézio qui est tombé ce matin, " je pense au sujet de Brevet de français.

  • Ah, c’est marrant, moi quand je lis " Under the Bridge " dans le titre, je pense plutôt aux Red Hot.

- Parce que vous êtes normal. Moi, je suis irrécupérable. (voir jolie version de la chanson dans la colonne rose quand même)

Les élèves planchaient, certains semblaient souffrir ou crever d’ennui.

D’autres s’appliquaient. D’autres avaient la cervelle qui fume. D’autres encore notaient dix mots incluant leur nom et l’intitulé de l’épreuve, puis se mettaient à rêver, discrètement à la fenêtre,

ou au sens littéral, la tête entre leurs bras. 

Du sens littéral au sens littéraire, j’avais trois heures à tuer. Je surveillais les candidats, certes, mais j’avais le droit de m’occuper aussi. Alors je pris le sujet à bras le corps, comme les autres, et décidai de faire de ce texte de Brevet un thème d’Agrégation improvisé. Et il était ardu, ce thème ! Je retrouvais le plaisir de l’effort dans cette traduction sans correcteur en vue…

Oui, j’ai adoré préparer l’Agrégation.

Mais je détestais passer les épreuves.

Un texte difficile, donc, et si je ressentais à nouveau la joie de surmonter les obstacles d’un texte par la réflexion, j’en voyais d’autres qui souffraient, irré- mais- diablement, impuissants face aux mots comme le sans-abri devant l’enfant trouvé.

Mes collègues se lamentaient tout le jour de la baisse de niveau. Les " de mon temps ", les " ce n’est plus ce que c’était ", j’en ai entendus à la pelle.

Mais ce texte était complexe. Voyez vous-même:

LE_CLEZIO_TEXTE

A quinze ans, moi aussi, j’aurais peut-être grimacé en lisant cette prose…le niveau des élèves a baissé… Moi, je trouvai plutôt que le niveau du Brevet avait grimpé en flèche. Même sentiment lors de l’épreuve d’Histoire-Géo.

La compréhension, la grammaire, le commentaire de documents, tout me paraissait plus vache que quand je passais moi-même ce Bac d’avant le Bac.

A l’exception de la dictée. Une dictée de 4 lignes et demie que je lisais à voix haute, savourant chaque mot, prononçant les signifiants, imaginant les signifiés, qui paraissaient insignifiants aux yeux de mes non initiés. Un texte à l’imparfait, sans difficultés, pas même lexicales, mais on a toutefois jugé bon d’écrire aux tableau les mots " hameaux " et " loqueteux ", parce que les pauvres chéris risquaient de ne pas connaître.

Et puis on a noté le nom de l’auteur, comme à l’accoutumée. c’est sans doute mieux ainsi. Je vois d’ici les zéros en dictée perpétuels tenter d’orthographier au pif le nom de Maupassant…

LES MAUX PASSANTS

L’AIME OH PASSE SANS

LAIT M’EAU PAS SANG

LAID MEAUX PAS CENT

L’EST M’ HOP A SENT

La dictée de mon Brevet, il y a douze ans, n’était pas difficile non plus, mais elle était 3 fois plus longue. J’obtins 10/10 sans suer. Mais la dictée du jour était sur 6 points seulement, sur les 40 du Brevet. On se plaint que les élèves ne prêtent plus attention à l’orthographe, mais les institutions ne lui en accordent pas non plus. C’est un fait, on peut avoir une note de 34/40 au Brevet (17/20) avec un zéro en dictée. Par démagogie, on préfère donner 4 lignes et demie de dictée simple, où l’on note au tableau deux mots de vocabulaire, car on sait bien que les élèves ne lisent pas.

On augmente la difficulté des questions de compréhension d’un texte, on donne un sujet de rédac qui inspire autant qu’une raclette au mois d’août, mais on rogne sur l’essentiel. L’un de mes collègues proche de la retraite me disait se faire taper sur les doigts au sens propre en cas de fautes d’orthographe. aujourd’hui, on taperait plutôt sur les doigts d’un professeur réputé trop sévère.

Pour le plaisir, voici une version toute personnelle de la dictée de mots passants :

Dents les vils âges, on ne lui donne est guerre : on le conne essai trot ; on était fatiguer de lui deux puits quart antan con le voyez pro mener de m'azur en m'azur son cor loqueteux et dix formes sur d’eux pâtes de boit. Ile ne vous lait poing sans n’allez ceux pendant, pasqu’il ne conne essai pas autre chose sur la tère que ce coing de paix y, ses troie ou quatre hameaux ou il avez trainer sa vie mise et râble. Il avez mit dés front tiers à ça ment dit cité.

Enfin, un dessin qui fait sourire et réfléchir...

… Signé l’Inadmissible

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